Notre avis sur le dernier INDIANA JONES !

Par - // le 29 juin 2023

Il revient une dernière fois, et autant vous dire qu'il se fiche un peu de la réforme des retraites : à 80 ans, Harrison Ford enfile son chapeau pour un ultime tour de piste... Mais est-ce que ça vaut le coup de le soutenir au cinéma ? On répond à toutes vos questions, mêmes à celles que vous ne vous posez pas !

 

1969. Après avoir passé plus de dix ans à enseigner au Hunter College de New York, Indiana  Jones est sur le point de prendre sa retraite et de couler des jours paisibles.
Tout bascule après la visite surprise de sa filleule Helena Shaw, qui est à la recherche d'un artefact rare que son père a confié à Indy des années auparavant : le fameux cadran d'Archimède, une relique qui aurait le pouvoir de localiser les fissures temporelles. En arnaqueuse accomplie, Helena vole l’objet et quitte précipitamment le pays afin de le vendre au plus offrant. Indy n'a d'autre choix que de se lancer à sa poursuite. Il ressort son fedora et son blouson de cuir pour une dernière virée...

Alors, est-ce que c'est mieux que le 4ème ??

    →  Heureusement, oui !
 

Et est-ce un des meilleurs INDIANA JONES ?   

    →  Le film ne nous aide pas à faire un classement à dire vrai, mais on peut dire que ce n'est ni le meilleur, ni le pire.
 

Bravo pour la prise de risque, vous ne seriez pas un peu Suisse?   

     →  Hey oh, c'est gratuit ça ! En fait, ce nouvel opus ne cherche pas à dépasser ses prédécesseurs, et il ne rattrape pas non plus entièrement certaines erreurs du précédent. D'ailleurs, ce n'est plus Spielberg qui réalise, et...
 

Comment ça ce n'est plus Steven Spieleberg qui réalise ??? Hérésie, diablerie !!!

    →  Vous avez définitivement l'air à cran.... Mais non en effet, c'est désormais James Mangold à la barre.

Contrairement à Spielberg, qui est un vrai génie de la réalisation avec une fluidité incomparable dans la mise en scène (même si ça ne donne pas toujours de bons films à l'arrivée...), James Mangold est plutôt dans la catégorie des honnêtes artisans de Hollywood. Ceux qui touchent à tous les genres (western, action, biopic, comédie, super-héros...) avec une belle application formelle, même si on ne sent jamais vraiment une patte d'auteur derrière. Ne soyons cependant pas trop durs : Mangold a sur son CV 2 pépites à la lisière du chef d'oeuvre : COPLAND (peut-être le plus beau rôle de notre brave Stallone), et le fabuleux chant de cygne qu'était LOGAN.
Ce nouvel INDIANA JONES ne rejoindra pas ces 2 beaux films dans l'excellence, mais le résultat ne démérite pas pour autant...

 

D'accord... est-ce qu'il faut donc être rassuré sur le spectacle proposé ?

    →  Oui...et non (on vous voit devenir tout rouge, alors laissez-nous vous expliquer !)

La trilogie INDIANA JONES (remarquez notre fourberie) est un peu considérée comme la saga d'aventure ultime. Mais en 2023, peut-on raisonnablement encore espérer une telle promesse, quand le nouvel opus met en scène un héros de 80 ans ? La réponse est bien évidemment non. D'ailleurs, c'est quand il essaie d'aller sur le terrain du pur spectacle que le film se plante le plus. Tout simplement parce qu'aujourd'hui, on ne peut malheureusement plus reproduire des AVENTURIERS DE L'ARCHE PERDUE. Les scènes d'action et les cascades sont désormais entièrement faites par ordinateur, et le spectateur aura de toute façon déjà tout vu en termes de spectaculaire. 
Cela dit, le démarrage du film est assez impressionnant. Grâce à l'atout du prologue, on est reconnecté au personnage d'Indiana Jones avec un visage rajeuni de Harrison Ford. Une prouesse numérique qui devient un peu monnaie courante au cinéma (on en trouve dans chaque MARVEL, et même dans le dernier Scorsese), et qui, si elle n'est pas encore totalement aboutie sur le plan technique, fait franchement illusion. Et pendant les 20 premières minutes, le spectateur aura bien droit à sa Madeleine de Proust, en étant embarqué illico dans une grosse scène d'action avec l'Indiana Jones dont on se souvient : jeune, fougueux, bondissant, et tentant d'échapper aux Nazis. C'est rythmé, fun, ludique : on y croit, malgré les prémices des vilains défauts que le film va devoir se coltiner tout du long... Notamment avec l'usage constant d'effets numériques hideux, une habitude lassante chez la plupart des blockbusters depuis quelques années (mais qui témoigne surtout à quel point l'industrie hollywoodienne est en crise, avec des employés en sous-effectifs, sous-payés et devant tenir des délais impossibles).

 

Bon et qu'en est-il du reste du film ?

    →  On vous dit tout, sans aucun spoiler !

Après cette intro, un saut dans le temps viendra nous confronter à ce qu'il en est : Indiana Jones est désormais bien un vieil homme, aigri, meurtri, dont le corps ne cache en rien le poids du temps. Le film a l'intelligence de ne pas prétendre le contraire. Mais il ne se résout pas immédiatement à cet état de fait : pendant une bonne heure, LE CADRAN DE LA DESTINÉE est hélas assez pénible à suivre.
Tout simplement parce que le déroulé est poussif, et l'avalanche de scènes d'action faites sur fonds verts rappelle les pires heures du 4ème opus. Autant dire que la sauce a du mal à prendre. 
Et puis, au détour d'un dialogue à priori banal en pleine mer, Harrison Ford nous transmet un torrent d'émotions en insistant sur la mélancolie qu'à Indiana Jones à vivre sa nouvelle aventure sans ses êtres aimés. L'acteur, qui a pris la fâcheuse habitude de reprendre chacun de ses rôles cultes avec plus ou moins de bonheur lors de cette dernière décennie (que ce soit dans STAR WARS, BLADE RUNNER, ou ici), prouve qu'il en a encore sous le capot. Lui qui était si fougueux par le passé, est devenu avec l'âge un ténor de la gravité, où il excelle.

Comme un petit miracle, à partir de ce moment, le film retrouve des rails beaucoup plus agréables à suivre. Une scène aquatique tendue (la seule qui bénéficie d'effets spéciaux réussis, d'ailleurs), un méchant qu'on aime détester (en même temps pas difficile quand il est interprété par le grand Mads Mikkelsen), des enjeux plus clairs : on se raccroche enfin au récit, avec une belle promesse à la clé...

 

Comment ça 'une belle promesse' ?

    →  On va clarifier, toujours sans aucun spoiler !

Il est de coutume dans chaque INDIANA JONES de fleurter avec le fantastique. C'est encore le cas ici, et LE CADRAN DE LA DESTINÉE le fait heureusement de manière beaucoup plus harmonieuse que son prédécesseur (rappelez-vous de ce vilain alien sorti de nulle part à la fin du 4, brrrrrrrrrrrr).
En fait, le film tease tout du long une possibilité de conclusion, et le spectateur un peu averti pourra imaginer sans mal où le récit le mènera. Et pourtant, force est d'admettre que le film se termine sur un climax très surprenant dans ce qu'il met en image, et qui ne va pas là où on l'attend. Impossible de ne pas décrocher un sourire d'enfant devant la teneur de ce qui se passe à l'écran, avec des visuels qui poussent le concept du film jusqu'au bout. Mais plus qu'un beau catalogue d'images, ce dénouement devient soudainement d'une cohérence narrative totale, au détour d'un échange franchement poignant entre Indiana et sa filleule (brillamment interprétée par Phoebe Waller-Bridge : on vous le répète à longueur d'articles, mais foncez sur Amazon Prime découvrir sa série FLEABAG, bon sang !).
Le tout avant une jolie scène finale, qui encapsule et résout la thématique principale du film : comment traverser sa vie sans subir le poids du temps ?

 

Si j'ai eu la flemme de tout lire jusque-là, vous pouvez résumer votre avis ?

    →  INDIANA JONES ET LE CADRAN DE LA DESTINÉE est symptomatique de son époque : il joue sur la nostalgie en utilisant de la pire des façons toutes les technologies actuelles, avec à l'arrivée un spectacle numérique qui fait presque bailler dans des scènes d'action tristement artificielles.
Cependant, le film se relève via une belle interprétation toute en douleur rentrée de Harrison Ford, et pousse son concept dans ses derniers retranchements avec un climax jouissif.
Ne vous attendez donc plus à un grand film d'aventure, mais à de jolis adieux à un des personnages les plus célèbres du cinéma. Et tout compte fait, ce n'est déjà pas si mal !